Depuis plusieurs semaines, je tente de tenir informés les lecteurs de ContreLaCour de l’avancement de l’adoption des deux règlements qui constituent le « Two-Pack »:
– le règlement relatif au renforcement de la surveillance économique et budgétaire des États membres connaissant ou risquant de connaître de sérieuses difficultés du point de vue de leur stabilité financière au sein de la zone euro
– le règlement établissant des dispositions communes pour le suivi et l’évaluation des projets de plans budgétaires et pour la correction des déficits excessifs dans les États membres de la zone euro
Ils visent à introduire un contrôle beaucoup plus strict des pays de la zone euro en difficulté, notamment ceux souhaitant bénéficier d’une assistance financière.
Aussi, ils visent à encadrer encore davantage le processus d’élaboration des budgets nationaux. Le second prévoit en effet la transmission des projets de loi de finances à la Commission européenne.
Pour en savoir plus sur le contenu des deux textes: cliquez ici
Bref historique
Ces deux projets de règlement ont été publiés par la Commission européenne le 23 novembre 2011 et approuvés par le Conseil des ministres des finances (EcoFin) le 21 février 2012.
Arrivée entre les mains des eurodéputés, la Commission ECON du Parlement européen, rassemblant 95 eurodéputés, s’est réunie le 14 mai 2012 pour voter deux projets de règlements qu’elle a largement modifiés.
C’est donc les versions amendées des deux textes qui ont été présentées en séance plénière et adoptées par les eurodéputés le mercredi 13 juin 2012.
Parmi les modifications introduites par les députés, la plus notable est sans aucun doute l’ajout d’un chapitre III au règlement « suivi et l’évaluation des projets de plans budgétaires » – chapitre consacré à la gestion de la dette et demandant notamment:
* la présentation d’ « un rapport établissant une feuille de route vers la création d’obligations de stabilité de la zone euro », ainsi qu’une proposition visant à mobiliser environ 1% du PIB par an sur une période de dix ans, y compris au moyen d’une augmentation du capital de la Banque Européenne d’Investissement ou de project-bonds
* la création d’un fonds européen d’amortissement(FEA) – appelé communément « fonds de rédemption » – , fondé sur une responsabilité conjointe et une discipline budgétaire stricte, et agissant sur une période de 25 ans.
Depuis lors, des trilogues se tiennent régulièrement afin de trouver un compromis entre la Commission européenne, les Etats (Conseil européen) et les parlementaires, représentés par laCommission ECON et notamment par les deux rapporteurs des textes: M. Gauzès (PPE) et Mme Ferreira (S&D).
De ces trilogues, la presse et les sites officiels européens n’en disent pas un mot. Dans ces conditions, difficile de suivre les avancées des négociations et d’imaginer la trame final des textes.
Il y a quelques semaines, j’apprenais cependant que la règle d’or contenue dans le règlement « suivi et l’évaluation des projets de plans budgétaires »était abandonnée. Si cette disposition posait de sérieuses questions de légalité (respect du principe de subsidiarité), son inscription dans le Pacte budgétaire la rendait, sinon caduque, totalement superflue.
La discorde du chapitre III
Le 3 décembre dernier, le Two-Pack était à l’ordre du jour du Conseil de l’Union européenne (Affaires économiques et monétaires).
Deux jours plus tard, les représentants des trois institutions étaient réunis afin de trouver un compromis.
Ce nouveau trilogue, le seizième du genre, fut cependant un échec.
En effet, si les dispositions »historiques » du Two-pack ne semblent pas poser de problèmes, la pomme de la discorde se situe dans le chapitre III consacré à la gestion de la dette. Des dispositions qui relèvent plus d’une déclaration d’intention que de véritables dispositions réglementaires, et dont, par conséquent, le Conseil européen (et en première ligne, l’Allemagne) ne veut pas entendre parler dans le cadre du Two-Pack.
Afin de satisfaire les deux parties, la Commission a donc travaillé sur une déclaration distincte regroupant les doléances inscrites par le Parlement. Celle-ci fut présentée aux eurdéputés le 29 novembre dernier mais n’a pas satisfait les parlementaires des groupes ADLE (Centre), S & D (Sociaux-libéraux) et Verts.
Ces derniers considèrent en effet la déclaration comme »insuffisamment explicite ».
Pour la Commission européenne, il est difficile d’en faire plus. Celle-ci considère qu’aucun fonds de rachat européen ni d’obligations communes (eurobonds) ne peuvent être mis en place sans une modification du traité.
Selon le site d’information europolitics, l’équipe de négociation du Parlement a essayé, lors du trilogue du 5 décembre, de pousser l’exécutif européen à donner plus de garanties concernant les prochaines étapes.
Guy Verhofstadt, Hannes Swoboda et Rebecca Harms ont ainsi présenté une lettre dans laquelle ils demandent à la Commission une proposition législative, au plus tard en juin 2013, pour la création du fameux fonds de rédemption.
Une entêtement qui, selon Jean-Paul Gauzès (PPE), « déconsidère le Parlement européen », pourtant attendu par les Etats qui avaient, déjà en février dernier, mentionné leur empressement à la sortie rapide de ces deux nouveaux règlements.
Une priorité des ministres et des chefs d’Etat qui justifie d’autant mieux l’attachement des parlementaires sociaux-libéraux et européistes à ces dispositions.
Sans doute pensent-ils tenir là un excellent moyen de faire avancer les Etats sur la question délicate de la mutualisation de la dette.
Rendez-vous donc en janvier pour connaître les conclusions du prochain trilogue.
[box]Merci d’avance à tous ceux qui publient/relaient mes articles. Merci cependant de sélectionner un extrait et de mettre le lien vers l’article original! Magali[/box]
Laisser un commentaire